sacrifice
En ces temps de blocages des lycées, je suis extrêmement mal à l'aise. Je laisserai de côté le débat sur les retraites. Si vous me lisez un peu, et si vous vous baladez dans les blogs que je vous recommande, vous devez savoir où je me situe politiquement.
Pour moi, il y a une urgence, avant le débat sur les retraites (oui oui oui) : assurer l'entretien, voire la rénovation de l'ascenseur social (ne serait-ce que la réparation de l'escalier social qui semble complètement condamné). Les blocages des lycées ont des conséquences négatives surtout pour les élèves issus de milieux défavorisés. Et donc pour cette seule raison, je ne peux que m'opposer à cette méthode, c'est plus fort que moi. Je m'explique.
Quand un élève riche rate la moitié de ses cours, voire la totalité pendant deux semaines, ce n'est pas bien grave : il a un ordinateur avec Internet pour aller chercher les cours mis en ligne par les professeurs, il a des contacts qui ont déjà les cours des années précédentes, des parents qui peuvent lui expliquer la définition de "métaphore" ou la mise sous forme canonique d'un trinôme du second degré, sinon ils ont des amis qui ont des amis qui le peuvent. Et en dernier recours, il peut s'acheter des cours particuliers : Alexandre Guillot d'Acad*mia serait ravi de lui faire un cours de statistiques bien démago sur le comptage des manifestants. Et puis il y a aussi, dans les milieux favorisés, beaucoup de parents qui obligent leurs enfants à aller au lycée, quitte à ce qu'ils se retrouvent seuls en cours.
[Il a pas l'air trop bien, ce blog, que je viens de découvrir, en recherchant le nom exact de notre cher Alexandre ? Je finis cet article, et je vais en lire un peu plus.]
Tous les autres jeunes ? Tant pis pour eux. Ils sont comme tous les élèves, engagés en politique ou pas, ils préfèrent ne pas aller en cours. Donc politisés ou pas, ils perdent aussi deux semaines. Mais ils n'ont pas les moyens des riches pour rattraper. Et ils sont moins nombreux à avoir des parents qui les obligent à aller au lycée...
Quelle injustice ! Et personne, ni les profs, ni les élèves, n'en semble conscient. Comment être aveugle à ce point ? Comment peut-on dormir tranquillement quand on sait qu'on est en train de sacrifier la jeunesse (oui, les grands mots, oui) pour un combat perdu d'avance ? (oui, les retraites, c'est perdu d'avance, les syndicats savent très bien jusqu'où ils négocieront, et ce que le gouvernement acceptera de lâcher, cf le CPE...) (j'avais dit que j'en parlerais pas, mais bon). Deux ou trois jeunes racailles qui n'auront jamais de diplôme, si ça permet de sauver les salariés, c'est pas bien grave. (et au fait, les vrais pauvres, ceux qui sont sous le seuil de pauvreté, les dames du quai de Ouistreham, et autres chômeurs en fin de droits, ils peuvent espérer quelle retraite ?)
Et la prochaine fois, je vous parlerai encore de blocage, mais vu de la salle des profs.
My mama said a lady ain't what she wears, but what she knows.