potentiel

Publié le par June Prune

Un conseil de classe, c'est une fin et un début, c'est un bilan, c'est un nouveau départ.

 

Mais les incohérences du système profitent aussi de ces moments pour nous sauter au visage. En particulier, on voit très vite que personne ne sait ce qu'il évalue, et personne ne cherche à le définir : le travail, le sérieux, les capacités ?

Ah, les capacités. Préciser qu'un élève a des capacités sous-entend que d'autres n'en ont pas... Et ça, c'est insupportable pour moi.

Je crois que tout le monde est capable de faire des études. Les inégalités se construisent au fur et à mesure de la scolarité. Mais n'importe quel élève, à n'importe quel niveau, peut y arriver. Le seul frein (et non des moindres) est l'environnement personnel de l'élève (social, psychologique etc). Mais j'ai déjà vu le lycée servir de bulle de protection pour des adolescents qui venaient s'y réfugier, et qui ainsi réussissaient à se concentrer sur leurs études et à réussir. Cela arrive même plus souvent qu'on ne le croit.

Je m'égare. Tout cela pour dire que je suis toujours extrêmement choquée quand on dit à un élève qu'il a des capacités non exploitées. Alors que le voisin peut continuer à faire tous les efforts du monde, il n'y arrivera jamais. Quelle cruauté ! En ce qui me concerne, j'évalue deux aspects du travail des élèves : les résultats et le sérieux. Pas le potentiel, puisque tout le monde en a.

 

Je ne crois pas du tout au concept de l'élève faible mais scolaire. Ne commencez pas à reprocher à un élève d'être scolaire. C'est exactement ce qu'on attend d'un élève, qu'il soit scolaire. Alors félicitons-le, au lieu de le mépriser. Il aura bien d'autres occasions dans la vie de montrer qu'il sait improviser, inventer, surprendre. En attendant, l'école ce n'est pas ça. Je le regrette profondément, certes. J'essaie dans mes cours de faire travailler l'imagination et la créativité quand c'est possible. Mais je ne reproche pas à un élève de ne pas s'adapter à ce genre d'activités. Cela fait des années qu'on lui enseigne le contraire, je ne prétends pas le changer en deux heures.

 

L'élève faible qui travaille comme un dingue, c'est un mythe. Il s'agit en fait d'un élève timide qui ne décroche pas un mot en cours et qui écrit tout le temps pour qu'on le laisse tranquille. Alors les profs croient qu'il travaille, qu'il est sérieux, méritant et un peu limité le pauvre. Et quand il se plante lamentablement à une interro, on dit qu'il a perdu ses moyens. Moi je pense au contraire que cet élève est un ado comme les autres, qui n'aime pas faire ses devoirs. Et qui ne les fait pas. Et qui le sait très bien. Et qui se moque intérieurement de tous ces profs qui se font avoir en croyant qu'il est sérieux. Parlez-donc cinq minutes avec lui après lui avoir rendu une mauvaise note. Demandez-lui s'il s'était assez entraîné. Il ne vous dira pas qu'il a fait cinq fois de suite parfaitement ce genre d'exercice à la maison et qu'à cause de monsieur le méchant stress il savait plus faire le jour J. Si c'était le cas, il aurait pas 4/20. Il aurait 11/20 au lieu de18. Et oui. Combien de fois je suis passée pour une méchante dame en conseil de classe en expliquant que non, il n'est pas sérieux, non il n'apprend pas ses leçons. Et que oui, l'autre, là, celui qui a des 12/20, il bosse, malgré ses airs nonchalants qui veulent faire croire qu'il est surdoué.

 

Parlons du travail et des efforts, qu'on peut évaluer tout à fait objectivement avec des interros de verbes irréguliers ou de définitions. Ne parlons pas du potentiel, concept on ne peut plus subjectif, donc injuste, et complètement impossible à évaluer par définition. Bref, soyons justes.

Et dans un deuxième temps, en dehors du cadre professionnel, militons pour une école qui ne forme pas des élèves "scolaires", des adultes formatés, mais des citoyens ouverts et critiques sur le monde qui les entoure.

 

Quant à la participation, rions un peu si vous voulez. Est-ce vraiment utile de "participer" pour réussir ses études ?

Pour préparer une épreuve orale, un élève doit s'entraîner à l'oral. Mais cela signifie-t-il qu'il doit avoir constamment la main levée, répondre aux questions rhétoriques des professeurs pendant un cours magistral ? Non. Bien sûr, cela donne des cours vivants et intéressants. Mais si un élève ne "participe" pas à ces moments-là, cela ne veut pas dire qu'il ne réussira pas ses épreuves orales ! On peut être timide et très bon à l'oral. C'est au professeur de mettre en place des situations qui favorisent l'expression orale des élèves. Quant aux disciplines où les élèves ne seront jamais évalués à l'oral, on ne doit pas reprocher un manque de participation orale. On doit selon moi attendre d'un élève qu'il soit actif en classe, mais pas nécessairement oralement.

 

L'évaluation est un sujet vaste et je ne prétends pas avoir toutes les réponses, ni avoir réfléchi à tous ses aspects. Mais au moins je me pose des questions. Tout faire au feeling, c'est juste pas pro.

 

 

Elle est vieille mon histoire, j'suis pas le premier à penser ça.

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P
<br /> Pffff, long à lire, votre billet, pour quelqu'un qui voulait prendre du temp ;o)<br /> Faudra que j'y revienne, à tête reposée.<br /> Mais le potentiel n'est que ce qu'au final on arrive à réaliser, non ?<br /> Tenez, ma maison bretonne. Un fort potentiel, comme m'a dit l'agent immobilier le jour où il me la fait visiter.<br /> Le potentiel est encore intact, pas encore réalisé :D<br /> Mais je m'égare là, non ?<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> Ouais, je sais je me suis lâchée, le blog devait me manquer !!!<br /> <br /> <br /> Vous avez raison pour la maison comme pour les élèves : tous ont du potentiel, ceux qui n'en ont pas ont tout simplement atteint la perfection !<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> Genre un prof qui fait croire (et peut être même qui crois...) qu'il y a plus d'oral que d'écrit dans un cours !<br /> Soit tu te trompe et en fait ton cours c'est vraiment de la glande ; soit t'es un vrai génie parce que t'arrive à faire ce qu'aucun prof à ma connaissance ne réussi à faire. En effet les élèves ne<br /> vont pas discuter dans une autre langue que le français, ils n'ont pas de niveau, ils ne vont pas participer sur un texte ils s'en foutent, pas sur un film, ils ont honte de parler, ...<br /> Ou alors tu les fait participer en les interrogeant et ils vont sortir des phrases de moins de 5 mots pour que tu leur foute la paix et ça ne les aide presque pas (bâtir son enseignement sur du<br /> "presque" peut être...)<br /> En tout cas je reste septique.<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> il est énervé, Arthur...<br /> <br /> <br /> Ou il a décidé de troller mon blog ;-)<br /> <br /> <br /> Tu as raison sur la difficulté extrême de faire de l'oral. Mais d'après ce que j'ai lu d'elle, je suis sûre que C(éline) (c'est à elle que tu parles, il me semble ?) s'approche du génie, ne<br /> serait-ce que pour ces précieux moments où les élèves se lâchent en anglais, moments rares (ou pas, chère C(éline) ?) mais qui valent tous le boulot ingrat mais payant fourni toute l'année.<br /> <br /> <br /> Je suis la première à critiquer les profs en général, mais quand il s'agit d'une personne en particulier, j'essaie de la connaître avant d'attaquer, et sinon je lui laisse le bénéfice du doute.<br /> <br /> <br /> <br />
B
<br /> on va donner de la voix (...)<br /> des fois, j'me dit, j'veux voyager... parfois j'ai envie d'rester là...<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> On va quand même faire comme ça.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> Je aprtage aussi ton point de vue, sauf sur un point... et oui, en tant que prof de langue, je ne peux pas dire que l'oral ne compte pas... au contraire, c'est ce qui constitue la majeure partie de<br /> mon cours... disons 40/45 min sur les 55... et lorsque je remplis les bulletins, je commence toujours par une appréciation sur l'oral, avant celle de l'écrit. Pas facile au collège, surtout avec<br /> les plus grands: pour les 3emes, en LV1/LV2, le prof veut qu'on parle, donc "c'est pas du travail" donc "c'est la récré, on fout rien" (parce que oui, elle veut qu'on parle... donc on parle ... en<br /> français !!!) ... mais grâce à l'oral aussi, j'arrive à raccrocher des élèves en échec voire en opposition contre le systeme scolaire...<br /> Du coup, oui, pour moi l'oral est un "barômetre" ultra important, autant au niveau des progrès de mes élèves que pour "mon auto-évaluation"...<br /> Bises<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> Oui, bien sûr, je parlais de ma matière, pas de celles où on évalue et où on travaille l'oral !!! Tu as d'ailleurs la chance avec ta matière d'avoir un autre rapport aux élèves, que je me force à<br /> instaurer malgré tout avec les mathématiques.<br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> J'aime bien ton analyse. La question d'évaluation est très difficile, autant pour un prof que pour un élève. La réponse dépend à mon avis des objectifs que l'on fixe pour l'école. Si le but du jeu<br /> est de formater tout le monde avec le même moule, alors le fameux "potentiel" n'est rien d'autre que la capacité de l'individu d'y rentrer. Si le but du jeu est d'aider chacun à devenir meilleur<br /> que ce qu'il est et à se réaliser, alors (et là je te rejoins totalement!) chaque enfant un le potentiel, son propre potentiel.<br /> <br /> Tu as parlé dans un des articles de la moyenne. Pour moi la logique de la moyenne tue tous les efforts de faire de l'évaluation un moyen d'aider à s'améliorer.<br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> j'aime bien aussi ta vision du potentiel de formatage !<br /> <br /> <br /> Quant à ta phrase sur la moyenne, elle est courte mais efficace, ça me donne envie d'effacer mon article et de le remplacer par ta phrase ;-)<br /> <br /> <br /> <br />