chacun son boulot
Je lis assez peu de blogs de profs.
Mais quand je tombe sur un article sur l'Education Nationale, souvent hébergé par un grand média (L*bé, Rue*89...), c'est toujours pareil, je ne peux pas m'empêcher de lire les commentaires. Et c'est toujours pareil, c'est désolant.
Il y a ceux qui critiquent ces fainéants de profs immobilistes, et ceux qui défendent ces profs courageux engagés dans leur vocation qui se sacrifient dans un désintéressement total.
Personne pour rappeler que les profs sont des travailleurs, des salariés. Et qu'il faudrait peut-être qu'on les aide à se poser des questions sur leurs conditions de travail avant de faire le boulot de leur direction, de leur inspection, avant de se former eux-mêmes avec des bouts de ficelle, de faire le boulot du service de ressources humaines, de donner leur numéro de téléphone personnel aux parents, de répondre à leurs emails professionnels le samedi à 16h32, d'assurer quand même un conseil de classe programmé un jour de grève.
Comme je l'ai dit vendredi, "ce n'est pas aux professeurs de trouver des solutions aux problèmes de gestion des ressources humaines dans l'Education Nationale". Bref, chacun son boulot.
Dans le cadre d'une mission un peu particulière à mon poste - dont je ne parle pas ici en détails par souci d'anonymat - je fais moi-même avec une petite équipe, sans rémunération particulière, l'équivalent de l'élaboration d'un programme officiel, c'est-à-dire le boulot au moins de l'inspection. J'y trouve mon intérêt quand même, raison pour laquelle je reste dans ce groupe de travail. Mais si nous continuons comme ça, ces "programmes" ne seront jamais élaborés de façon rigoureuse, relus, critiqués, modifiés. Et c'est toute une partie du système qui se décharge de cette responsabilité.
Allez, encore un exemple où, à première vue, je m'intéresse à mon intérêt personnel avant celui des élèves, justement parce que j'estime que ce n'est pas mon rôle :
J'ai arrêté depuis quelques années les voyages scolaires. Quand nous acceptons de travailler 24 heures sur 24 pendant plusieurs jours, avec des responsabilités très différentes et beaucoup plus importantes que d'habitude, sans rémunération, nous déchargeons le système d'une hypothétique obligation de moyens (pas nécessairement financiers) pour assurer aux élèves la sécurité physique, morale et affective indispensable pour un tel séjour.
Si plus personne n'organisait de voyages scolaires, on pourrait peut-être espérer une réaction des usagers du service d'éducation, donc une réaction des responsables de ce service d'éducation. Et si cette réaction n'avait pas lieu, on voterait mieux la prochaine fois.
Dans une entreprise quelconque, ce n'est pas aux travailleurs de défendre les intérêts des clients. Dans le cadre d'un service public non plus, ce n'est pas aux travailleurs de défendre les intérêts des usagers. Faire bien son travail, c'est assurer une partie du service, donc satisfaire une partie des attentes des usagers. Mais le travailleur n'est pas la seule composante de l'élaboration de ce service.
Chacun son boulot, et surtout chacun ses responsabilités.